Ce soir, une très belle série se conclut sur Showtime. Si, si, sur la chaîne de Weeds, Nurse Jackie et United States of Tara. Bref, une série que tout le monde aurait pu zapper.
Déjà cause du sujet plutôt rébarbatif, à savoir le récit des "aventures" d'une femme atteinte d'un cancer, mais également pour la prévisibilité du casting (Laura Linney et Oliver Platt), et pour le diffuseur, spécialisé dans les dramédies de 30 minutes uniquement bons à récolter des récompenses pour leurs actrices principales à la quarantaine bien tassée. Et pour le titre le moins subtile de l'année : The Big C.
Mais dès le pilote, on est séduits. Par Laura Linney, solaire, plus que par les personnages secondaires, plutôt caricaturaux : le mari et père irresponsable et surexcité, incarné par le spécialiste du genre, Oliver Platt ; le frère SDF-militant, l'ado insouciant et sarcastique, le quota ethnique, incarné par Gabourey Sidibe (de Precious: Based on the Novel "Push" by Sapphire), et enfin la vieille dame caractérielle.
Soit une flopée de personnages aux caractères très marqués, plutôt égoistes et assez brouillons, mais des êtres chers à Cathy qui préfère leur cacher la récente découverte de sa maladie, et surtout reprendre sa vie en main ; tout d'abord, et d'une façon plutôt compréhensible, en se faisant matériellement plaisir, puis surtout en prenant soin de ceux qui l'entourent : son fils, contraint de passer l'été au domicile famillial, son mari, qu'elle préfère écarter de sa vie, de peur de tout faire basculer, ses deux nouveaux "projets" (sa voisine esseulée et l'une de ses élèves en difficulté scolaire), et enfin sa nouvelle bouffée d'oxygène, Lenny.
Le bilan d'une vie, celui d'une mère de famille, mené avec légèreté et délicatesse par une actrice/scénariste quasi-inconnue : on rit beaucoup, même durant les premiers épisodes, pourtant assez répétitifs, puis on se laisse emporter par la vie de Cathy, ses choix, ses retrouvailles, ses confrontations. Très vite, les personnages secondaires prennent vie, portés par une écriture incisive et juste. Les deux véhicules comiques que demeurent longtemps les personnages du frère et du mari parviennent à nous offrir, le moment venu, des moments d'émotions exceptionnels : la scène de la plage, saisissante et poignante, pour le premier, et celle de la salle d'attente de l'hôpital pour le second, demeurent ainsi des sommets des 12 premiers épisodes. Et qui nous font accessoiremment pardonner les frustrantes tentatives d'annonces de Cathy des débuts, avortées chaque fois par le débit de parole d'Oliver Platt.
Car là où la série brille, c'est dans son approche, toute en finesse et en retenue, d'un sujet au potentiel lacrymal énorme, et donc risqué. Et ce même lorsqu'elle décide d'aborder la religion, passage obligé mais particulièrement casse-gueule. La série parvient à nous parler de la vie quotidienne avec talent, sans sombrer dans l'ennui, et réussit, avec une certaine sobriété, à nous surprendre et nous emporter pendant 30 minutes, et ce dès les premières notes de l'envoûtant Game Called de Leftover Cuties qui berce le générique.
The Big C, c'est vraiment très bien. Et j'en suis le premier surpris.